Nathalie Jover

lisières
une exposition de Nathalie Jover

10 juin - 22 juillet 2023

Site web de l'artiste

« Il était passé à côté d’elle, juste à côté d’elle sans la voir. Parce qu’elle était de ces âmes qui ne font aucun signe, mais qu’il faut patiemment interroger, sur lesquelles il faut savoir poser le regard. Un peintre en aurait fait autrefois le sujet d’un tableau de genre. Elle aurait été

lingère,
porteuse d’eau
ou dentellière.»

La dentellière de Claude Goretta, avec Isabelle Huppert,
d’après le romain de Pascal Lainé, prix Goncourt 1974

L’entrée ne se trouve pas aisément, il faut passer par la gauche, longer un bassin de béton dont l’eau semble le reste d’une pluie lointaine.
Puis, une porte vitrée dont on pousse des poignées d’aluminium.
Un sas, une loge, un présentoir, une deuxième porte vitrée.
Une faible lumière baigne une pièce arquée à quatre pointes et sept fenêtres.
À travers leurs films sans teint, la vue porte à moins de cinq mètres.
Les cadres des fenêtres d’un aluminium épais retiennent notre regard à l’intérieur.
Ricochant sur radiateurs, interrupteurs, multiprises, caches plastique et autres boîtiers avant d’atteindre celui d’un vert lumineux au fond de la pièce qui indique : «Sortie».
Le plafond étend une trame de dalles de polystyrène montées sur rails, interrompue de puits de néons aux claies métalliques. Ils semblent éteindre davantage encore le motif passé d’un lino renvoyant à un minéral
fictif.
Cherchant dans ce dessin des signes quelconques, on observe alors par endroits qu’il fissure et se soulève. Des bosses légères remplissent à peine le creux d’une paume. Lents retours des poussées, débuts de buttes, présages d’autres hauteurs à venir ?
Une tour ramenée à sa part de platitude. Au dos de sa dalle, on cherche l’odeur. Lisière.
Tant d’arêtes portant à défaut la molle matière. Glissements sur écrans refusant le pénétrant, à l’exception parfois d’une insertion de carte sim par une fente fine. Fenêtres sans réalité. Tours érigées à l’algorithme.
Nous avons quitté les lieux, nous avons quitté les lieux.
Milieu porté à sa rupture, lisière.
Rappel des masses, glissements, sédiments.
Le panorama ne parvient pas aux fenêtres.
À défaut, pourvoir les fenêtres.
Art pour rideaux
Désuétude aluminium
Lés et lisières
Ornements d’intérieurs
Boîtiers pour bureautique
Moulures pour baguettes
Satin pour cordelettes.
Petites choses vaines en attente de forêt
On vient pour la voir.
Parce qu’elle est de ces architectures qui sont symbole, de celles dont l’axe est le regard et qui semblent tout savoir. Pourtant dans ces angles froids niche l’enfoui, dans ce corps de béton un grand sommeil.
Une lingère la recouvre,
une porteuse d’eau verse à son pied,
une dentellière dépose un ouvrage.

Nathalie Jover est née à Paris en 1978, elle est diplômée de l’UFR Biosciences Lyon 1, de l’Institut d’Arts Visuels d’Orléans, de la Maison de la céramique de Dieulefit et de L’ESPE de Saint-Étienne. Son travail a dernièrement été exposé au centre d’art «Le Manoir» à Mouthier-Haute-Pierre dans de Doubs, et dans le cadre du parcours d’art contemporain «Sillon» dans la Drôme en 2019 et 2021.
Après 8 ans passés dans l’atelier partagé «LaMezz» près de Lyon, elle a installé son atelier dans la Drôme en 2022.

Photos: Maxime Naudet.